
Les CMOs (Chief Marketing Officer) doivent repenser leur métier qui traditionnellement, s’articulait autour d’un plan annuel avec ses lancements produits et une présence par canal, vers la nécessité de prendre part au tissu social et créer une présence multicanale. Ils doivent désormais composer avec des consommateurs qui aspirent à plus de transparence, une sincérité, des prises de positions, des engagements forts et un leadership moral de la part des marques.
Ce qu’il faut retenir
- L’émergence massive des marques de niche devraient être autant de signaux faibles pour les grandes marques, que d’incitations à évoluer. Ces « petits » qui peuvent s’adapter vite, sans processus décisionnel long, pourraient éroder les parts de marché des grands.
- Les modes de distribution ont profité à la fois des technologies, de supports multiples, et d’une structure omnicanal que les plus grands n’arrivent pas à mettre en place.
- L’importance croissante des plateformes sociales et des médias individuels à grande échelle, créent des contre-courants.
L’émergence des marques de niche
La pandémie a ouvert des portes à de nouvelles marques qui ont pu se construire une identité et une présence alors que les plus grandes devaient faire face à un chômage partiel, une réduction des coûts et des ambitions revues à la baisse en termes de ventes. Nées sur les bases d’un monde incertain, elles ont profité de l’occasion pour se structurer en conséquence: positionnement fort et inclusif, organisation nativement en distanciel, outils SaaS, processus de décision simplifié, innovation décentralisée. Le futur des marques se trouve dans l’adaptabilité et la résilience. Pour éviter que les plus installées ne souffrent trop de cette concurrence, certes plus petite mais plus agile, il faudra faire du changement une norme.
L’évolution de la distribution
La distribution a elle aussi évolué. Si la croissance des ventes en ligne n’est plus à démontrer, le véritable challenge réside dans le modèle même de la distribution. Les enseignes multi-marques et les distributeurs achètent leur produits et les revendent. Ils en sont donc propriétaires. Ce schéma rompt à la fois l’expérience et la communication avec le client final, au moment où celui-ci entre dans un magasin physique. Pourtant, si les clients étaient véritablement placés au centre des préoccupations, l’expérience devrait être fluide à chaque étape de la progression, même après la vente. Les nouvelles marques compensent quant à elles souvent par des ventes exclusivement en ligne. Mais l’expérience humaine reste primordiale, a fortiori pour les produits de luxe. Aux dispositif phygitaux de garantir alors une fluidité dans l’expérience. Paiement en magasin directement à la marque, accueil personnalisé, « mobile shopping in store », sont tout autant d’outils qui permettent d’augmenter cette expérience.
Le rôle des plateformes sociales
À cela s’ajoute les organisations traditionnelles (marketing, communication, ventes, SAV, IT) qui attribuent des objectifs annuels par silo, et ne peuvent donc espérer une expérience forte et cohérente puisque les indicateurs reposent sur des individus et des performances internes, loin de la préoccupation client. Dans ce contexte, le rôle du CMO continue d’évoluer. Il doit adapter sa stratégie marketing pour prendre position et engager la marque, adapter son organisation pour la rendre plus souple et résiliente, installer un écosystème omnicanal dans une organisation traditionnellement multicanal. D’une posture de jongleur entre tous les silos traditionnels de l’organisation, il doit devenir le chef d’orchestre de la voix de sa marque auprès des véritables clients finaux.
Son rôle ne peut plus se limiter aux lancements annuels. Le contenu et l’interaction deviennent plus que jamais un levier de transformation, bien au-delà de la promotion et la publicité traditionnelle. Le CMO doit s’adapter aux évolutions sociétales s’il veut inscrire la marque sur le long terme. Bottega Venetta a ainsi décidé de fermer tous ses réseaux sociaux en Chine au début de l’année 2021 pour concentrer ses efforts sur leurs ambassadeurs et leurs fans. A en croire la marque, 95% des décisions d’achat sont prises pendant le parcours digital, les forçant à redevenir cohérents sur leurs valeurs et ré-inspirer leurs clients. C’est une réadaptation faite sur les constats sociétaux, les micro communautés auxquelles appartiennent leurs fans, et c’est sans doute là où réside le futur des marques de luxe.